Être vétérinaire offre des privilèges dignes des rêves de l'enfant qui sommeille en chacun de nous. Tenir un faucon dans la main en est un. Comme de faire naître un veau, ou un chiot, ou un poulain. Instants de grâce dont je mesure, à chaque fois qu'ils m'échoient, leur rareté et leur fragilité. Instants de grâce sur lesquels se bâtit le fantasme du métier de vétérinaire. J'ai euthanasié ce rapace quelques minutes après avoir pris cette photographie. Aile brisée sur une articulation, irréparable. EDIT : Merci à la chouette blanche en commentaire pour sa diagnose, il s'agit bien d'un épervier....
mars 2009
dimanche 15 mars 2009
Libération ?
dimanche 15 mars 2009, 20:53 / 11 commentaires
« Vous comprenez, docteur, son incontinence est de pire en pire. Elle marche et elle laisse des traînées d'urine derrière elle, dans le commerce, et ça sent mauvais et il faut tout le temps nettoyer, alors on la laisse dehors, mais elle a dix ans et... » Une grosse carcasse de labrador, au moins 40kg, avec une incontinence urinaire de chienne stérilisée qui avait démarré environ un an après la chirurgie. On avait essayé tous les traitements, ils avaient tous fini par échoués. Périodiquement, le vieux monsieur se remotivait et acceptait que nous réalisions un examen de plus ou que nous prescrivions une autre molécule. En vain. Mais l'euthanasier pour une incontinence urinaire, c'était...
jeudi 19 mars 2009
Fin
jeudi 19 mars 2009, 12:36 / 7 commentaires
Deux camions blancs. Des meuglements. Un filet d'urine qui coulait par l'une des portes du camion. Tout le village était réuni. Au moins... 6 personnes. Les transporteurs étaient presque aussi nombreux qu'eux. Moi, j'étais là pour signer quelques papiers, presque par hasard. Quand je suis arrivé, elles étaient déjà embarquées. Elles étaient une cinquantaine, plus quelques veaux et génisses "de renouvellement". Elles ne sont plus que deux, qui partiront demain, pour l'abattoir. Un petit vieux m'a dit : "un paysan de moins". Il n'a rien ajouté. Moi, j'avais le cœur gros. Les camions sont partis. L'éleveur m'a regardé : "je crois que je n'ai pas encore réalisé"....
samedi 21 mars 2009
Je suis vétérinaire
samedi 21 mars 2009, 23:34 / 81 commentaires
Il y a de cela quelques semaines, une lectrice m'interrogeait par mail afin de savoir - je résume - si le métier de vétérinaire "était aussi éprouvant que cela". J'ai entamé une réponse brève à ses questions précises, puis j'ai abandonné mon message, en proposant un billet ultérieur. Alors faisons simple : être vétérinaire, c'est éprouvant, c'est difficile, c'est compliqué. D'ailleurs, pourquoi être vétérinaire ? J'ai un doctorat et un BAC +6. J'ai survécu à une prépa. Comme beaucoup de mes confrère, je travaille entre 50 et 80 heures par semaine, sans compter les heures d'astreinte ou de garde. Un associé a la responsabilité de sa société, de ses salariés, et de sa famille. Je ne...
dimanche 29 mars 2009
Non, c'est mon vétérinaire
dimanche 29 mars 2009, 12:05 / 12 commentaires
Hôpital - Réception des urgences - Bonjour madame. - Bonjour ! Et le sourire, jolie réceptionniste ? Quoi, c'est un cliché, la jolie infirmière au comptoir de l'hôpital, qui regarde d'un air dégouté l'éleveuse mal dégrossie ? - Votre nom s'il vous plait ? - Bleuet, comme la fleur. - Vous avez votre carte Vitale ? - Oui oui. Est-ce qu'on commence vraiment par demander la carte Vitale, aux urgences ? Sans doute, lorsque le patient n'est pas en train de se vider de son sang. - Vous venez pour ? - C'est le docteur qui m'envoie, il dit que mes douleurs à la poitrine, c'est peut-être une crise cardiaque. - Quel docteur ? Je suis sûr qu'elle l'attendait, Mme Bleuet, sa réplique, sa tirade. -...
mardi 31 mars 2009
Même pas mal
mardi 31 mars 2009, 13:44 / 19 commentaires
C'est allé très vite. La vache était couchée, incapable de se lever, très maigre. C'est d'ailleurs pour ça que j'étais là. Une salers, avec ses cornes en lyre, si longues. Elle n'a lancé qu'un petit mouvement de tête quand il s'est approché pour lui passer une corde. Un petit mouvement, très lent, et pourtant : ça n'a duré qu'un instant. Il s'est reculé en se tenant l'entrejambe, avec un "Hmmfffff" éloquent. J'ai couru jusqu'à lui, qui s'était appuyé contre le mur de la stabulation. La vache, elle, s'était remise à ruminer. "C'est rien, c'est rien." Il m'a rassuré, et s'est écarté du mur. En titubant. Il est tombé à genou. Entre ses jambes, maculant la toile épaisse de...