Agneau de nuit
dimanche 8 janvier 2012, 10:29 Vétérinaire au quotidien Lien permanent
Autant vous prévenir, le billet qui suit est gore. Choquant. Un épisode classique d'une vie de véto, cru et répugnant. Il y a un animal qui souffre, et d'autres trucs moches.
Parce que véto, c'est aussi des trucs comme ça.
Vous êtes prévenus.
Il est 20h30, je finis de "réceptionner" un chien accidenté, et le téléphone sonne à nouveau.
"Je viens de rentrer, j'ai une brebis qui ne se lève pas, elle a agnelé hier matin, et elle pourrait pas en avoir un autre dedans ?"
Boaf, c'est peu probable. Mais pas impossible. Je pourrais lui dire de venir chercher antibios, anti-inflammatoire et un peu de sucre et de calcium, mais... autant amener la brebis, hein ?
Quoi qu'il en soit, je n'en ai pas fini avec mon labrador, là. La perf est posée, l'analgésie réalisée, le chien stabilisé, les radios faites. Un tibia explosé, je finis un pansement contentif en préparant son transfert chez des confrères capable de l'opérer, demain. Et même si cela ne me demande, finalement, qu'une dizaine de minutes, il me reste à vérifier mes hospitalisés, contrôler la caisse, préparer la remise et envoyer la commande. Et tant qu'à faire, je pourrai aussi remplir quelque fiches de consultations un peu trop succinctes.
De toute façon, il ne me reste plus qu'à l'attendre, ma brebis.
J'ai même préparé mes seringues. Quand il arrivera, je vais lui coller un thermomètre (à la brebis, hein, gros malins), constater l'infection, lui faire les piqûres, et nous renvoyer à la maison (mais comme je suis en train d'écrire ce billet, vous vous doutez bien que cela ne s'est pas passé comme dans mes plans).
Le gars a garé son C15 devant l'entrée, à cul devant la porte, histoire de profiter de la lumière. Pas question de faire rentrer cette bestiole alors que le ménage vient juste d'être achevé. Deux heures plus tôt.
La brebis est couchée sur le flanc, elle est capable de relever la tête, elle a le regard vif.
"Mais elle ne tient pas debout, j'ai vraiment eu du mal à la charger !
- Ouais, je suis désolé, mais j'avais un chien accidenté à gérer, venir aurait pris trop de temps, et puis ça vous économise le déplacement, hein."
Un joli morceau de 80kg, je comprends qu'il ait eu du mal à la porter. Elle a déjà agnelé 4 fois, chaque fois des jumeaux, et cette fois il n'y en a qu'un. Je comprends qu'il en imagine un à l'intérieur. 39.2. Tachycardie, mais bon, avec le transport... Les muqueuses ok.
De toute façon, rien ne vaut un bon bras au fond du vagin. Voire dans l'utérus. Il y a une poche, là bas au fond, presque une sphère parfaite. A travers la membrane, je sens des os... il y a bien un agneau. J'essaye de lui saisir un os - une omoplate ? - à travers la membrane, il ne réagit pas. Mort, évidemment. Cette poche est curieuse, granuleuse. Une placentite des familles ? Je suis surpris qu'elle n'ait pas percé. Je suis encore plus surpris de ne pas arriver à la percer. En tout cas, je ne m'y retrouve pas trop, à travers mes gants. Il me semble sentir une épine dorsale. L'agneau a du venir par le dos, en boule, et rester coincé. Mais il est hors de questions que j'enlève mes gants.
Je suis automatiquement passé en respiration buccale. Réflexe de survie vétérinaire.
La brebis supporte assez bien mes explorations et manipulations. Elle pousse sans efficacité, elle ne se débat pas trop. Je glisse ma main et mon bras sur la face dorsale de l'utérus, pour faire le tour de l'agneau et comprendre sa position exacte. Tiens, la membrane est plus fine, ici. Je tente de percer.
Et je ne suis pas déçu : un gaz pestilentiel s'échappe, un flot de truc sanguinolent à l'odeur de cadavre faisandé, et le tout s'écoule sur le seuil du coffre pour finir sur celui de ma porte.
Le pied.
L'éleveur s'est écarté d'une dizaine de mètres, dégoûté.
L'agneau est pourri, emphysémateux, et ce que j'ai pris pour une enveloppe foetale mal foutue, c'était sa peau décollée de son corps par les gaz de putréfaction. La zone plus fine, c'était la peau abdominale, sous le grasset. Maintenant, je perçois bien mieux son squelette et ses muscles à travers sa peau. Il a la tête vers le pis de la brebis, une patte de chaque côté probablement. C'est là que je vais devoir travailler.
Mais d'abord, antibios, anti-inflammatoires. IV.
Cette fois, je glisse mon bras sur la face ventrale de l'utérus. C'est bien moins facile à cause de sa courbure. J'ai mes gants, évidemment, mais je sais qu'ils ne suffiront pas et que mes mains pueront la charogne pendant au moins 24h. Quant à mon pull, je n'en parle pas. A genou derrière le C15, à 21h, dans la nuit et la pluie, j'imagine, à l'hôpital, les sages-femmes avec leurs magnifiques tables d'accouchement rondes et colorées, les murs peints de motifs enfantins, les blouses bleu et rose pastel.
J'ai trouvé la nuque, je glisse mes doigts de chaque côté de la tête de l'agneau. Tout glisse, je n'ai pas de prise. Sa mâchoire m'échappe. Je tente de saisir la patte antérieur du "dessus", j'y arrive sans trop de difficultés. Je l'amène dans la filière pelvienne, puis je retourne à la tête. Ça va me permettre de remonter un peu l'agneau, et puis ça me donne l'impression d'avancer.
La suite dure une dizaine de minutes. Essayer de choper la tête, la redresser en la faisant passer dans le bassin. No way. A chaque fois, il y a quelque chose qui bute, et elle m'échappe. Pourtant, je me suis trouvé des prises. La mâchoire : trop fragile, elle s'est démantibulée à la symphyse. Les orbites : ok, mais il faut une foutue force de serrage dans les doigts pour s'en servir pour redresser la tête. Et je vous passe la sensation répugnante des globes qui éclatent sous le doigts... Le cou, ouais, bon, mais l'angle n'est jamais satisfaisant.
La brebis, elle, a abandonné. Elle ne bouge plus, mais elle respire bien. Elle a mal. État de choc.
L'odeur est abominable. Celle d'une verminière de centre d’équarrissage, d'un chien qui vient de se rouler dans la charogne, avec ce sang noir et plein de flocons de pourriture. Il y en a plein le sol, plein le C15, et j'essaie, en manœuvrant l'agneau, de ne pas m'en coller sur le futal. Et je ne me débrouille pas si mal, à cet égard.
Finalement, je ne sais pas trop ce qui m'a réussi, mais la tête est là. Amochée, mais bien placée. Il ne me reste plus qu'à me coincer une dernière fois les doigts pour dérouler l'autre antérieur, et l'extraction finale ne sera qu'une formalité. Je sors le corps de l'agneau, et l'éleveur réalise l'enfer que c'était là-dedans. Il finit sa course dans un sac poubelle, mais il y a encore du sang dégueulasse pour pourrir tout sur son passage.
Il me faut encore perfuser la maman, histoire de ne pas avoir fait tout ça pour rien. Corticos, analgésiques. L'éleveur me demande si elle s'en sortira. Je n'en sais rien, je pense que oui, si l'utérus a tenu bon. Car chaque mouvement, chaque torsion, chaque jeu de leviers sur les membres, le crâne et le corps de l'agneau ont du se faire sans appuyer sur une matrice forcément fragilisée par l'infection. Si elle est percé, faisons court, la brebis est foutue. Sinon... on verra bien demain. Je ne lui laisse pas de médicaments : il reviendra les chercher si c'est utile.
Moi, il me reste à nettoyer le seuil de ma clinique, histoire de ne pas avoir des évanouissements de clients demain à l'ouverture. Et le jet d'eau est cassé. Il me reste le seau, le balai brosse et la javel. Il ne pleut même pas assez pour que cela puisse m'aider.
Il est 21h45, largement l'heure de rentrer à la maison.
***
Le lendemain, entre deux consultations, j'ai vu revenir l'éleveur. Quand il m'a aperçu entre deux portes, il a levé son pouce vers le haut, avec un sourire appréciateur.
C'est fou comme ça peut faire du bien.
Commentaires
Bon ça va, j'm'attendais à pire, genre tout le monde meurt à la fin... Ouf ! En tous cas bravo, c'est un métier de fou et c'est super que des gens comme vous le fasse si bien pour nous en faire "profiter" ensuite :)
Super récit !
J'adore vous lire !!!
Bon ... il faut être honnête: je pense que j'aurais beaucoup moins apprécié si j'avais été sur place (juste à cause de l'odeur) !
En tous cas c'est super que la brebis s'en soit sortie ! Bravo !
C'est pour ça que je mets toujours une casaque en plastique, même pour les agnelages, on ne sait jamais...
Fourrure :
C'est mon côté naïf. Je me dis : "ça va pas être ça". Et puis quand j'ai les mains dedans, je continue...
Vous ne voulez vraiment pas faire le travail des médecins en zone rurale? Un accouchement au cul d'un Kangoo, nettoyage au karcher, ça peut le faire :-)
Ah ben tiens, moi aussi je m'attendais à beaucoup plus gore (suis-je déjà "immunisée"?). A la lecture d'un tel article il me vient toujours plein de question, de choses que je ne sais pas ou pas encore. Du genre que s'est-il passé pour arriver à ça? Ou comment se fait-il que le premier agneau soit en bonne santé et pas l'autre? Bon après j'élabore aussi plein de théories plus ou moins improbables, mais en tout cas j'ai toujours envie de savoir, d'en savoir plus sur le côté médical. Est ce c'était une momification ratée? Est ce que cet agneau est simplement mort pour une raison indéterminée et s'est putréfié à cause de bactéries qui ne devraient pas être là?
Comme c'est mon premier commentaire je crois, bien que le blog soit dans mes favoris depuis des années, il faut que je dise que j'aime beaucoup ce blog, que ce soit la forme ou le fond de chaque article. Je crois que mon article préféré à ce jour est celui dans lequel l'IRC était expliquée. J'aime bien ce partage de connaissances...
Et puis Bonne Années Fourrure, puisse-t-elle inspirer de nombreux articles toujours aussi passionnants!
Fourrure :
Vous êtes tous des affreux, à vous attendre à pire. La brebis serait morte que ça aurait tout changé ?
L'agneau est probablement mort parce que mal positionné pour sortir, contrairement au premier. Après... il pourri comme tous les morts ! Son frère était né 36h plus tôt.
waouh !
Quelle fin de journée !
La brebis aussi est méritante qui a résisté , car une mise bas avec tout ça à l'intérieur..... Elle a du en baver la pauvre....
Félicitations ! Et merci pour ce billet.
Je ne sais pas à quoi je m'attendais, mais je pense que c'est *beaucoup* plus facile à lire qu'à voir (et à sentir).
Est-ce un des aspects qui pousse beaucoup de vétos à s'éloigner de la rurale ?
Fourrure :
Le côté dégueu ? Je ne pense pas. Plutôt les contraintes d'horaires, et l'inadéquation entre le boulot fourni et le revenu. Sans parler du choix de lieu de vie.
Mais il était mort depuis combien de temps pour etre dans cet état ?
Fourrure :
A priori 36h.
Je me suis mise à respirer par la bouche avec toi. Reflexe!
;-)
Waouw. Ça avait pas l'air d'être drôle... En tout cas je suis admirative.
Oui ben moi je la trouve bien violemment gore, cette histoire. Ca doit tenir à cette histoire de putréfaction, ça doit venir du fait que je venais de manger...
Mais à lire la description, je m'attendais limite à un cadavre putréfié vieux de plusieurs mois, le genre à sortir liquide et vert, pas un mort-nez de même pas deux jours.
Bon, je vais penser à des trucs jolis et qui sentent bon, histoire que mon plat me pèse pas trop lourd sur l'estomac ^^
J'adore allumer mon ordi et voir un nouveau billet du Dr Fourrure. Non, sans rire, j'en frétille de bonheur même quand ça se termine mal, même quand sa pue jusque chez moi tellement c'est dégoûtant (j'aime vous imaginer pataugeant dans de la bouillasse immonde, c'est grave?). Vos billets sont variés et souvent passionnants, merci pour tout le véto :)
Pour la brebis cela a dû être aussi un sale moment à passer, mais elle a dû aussi apprécier que vous la soulagiez enfin. Je n'imaginais pas que cela puisse être si rapide la putréfaction. Je n'aurais jamais pu être vétérinaire.
Bonsoir Fourrure,
Personnellement, j'ai trouvé la parade pour les mains et les poils des avant-bras qui sentent la charogne pendant 2 jours et qui te rappellent la beauté de ton métier quand tu te grattes le nez... D'ailleurs, je m'etonnes que tu n'aies pas encore parlé de l'horrible sensation ressentie quand la transpiration te brûle les yeux et que tu as les deux mains dans la pourriture, et qu'il est illusoire d'enlever tes gants de fouille car tu sais que les 3/4 heures d'efforts les 2 bras dans la vache auront eu raison de leur étanchéité...
Bon, revenons a mon remède miracle, c'est le Cyteal, savon disponible en pharmacie (sic) et particulièrement efficace pour cacher habillement la misère.
Bonne soirée à toi et à ceux qui sont de garde.
Fourrure :
Celui là je le note, je vais en demander au pharmacien. Et pour la transpiration... il y a encore tellement de choses abominables à évoquer sur ce blog !
Ce que je trouve formidable, c'est qu'il y ait des gens comme vous pour "y aller" quand même, même si ça pue, même si c'est difficile, même s'il est tard.
Et qu'espérer d'autre, quand la vie vous joue ce genre de coup tordu ?
Merci pour les soins apportés, merci d'en porter témoignage, et bravo pour le coup de plume.
question docteur : pourquoi ne pas avoir fait une "césarienne" ?
ça aurait plus simple non ??
enfin je pense que la brebis n'aurait peut être pas supporté l'anesthésie !!??
Fourrure :
Trop de risques de provoquer une péritonite en extrayant l'agneau pourri.
Comment ça ?
COMMENT CA ?
Y'a pas une jolie infirmière pour vous éponger le front avec une compresse quand vous transpirez ?
Comment ça ?
Fourrure :
RTT
heureusement que vous aviez prévenu... et que la fin finit bien, hein (ça permet de garder un faible sourire)...
pour les odeurs tenaces sur la peau je ne sais pas, mais pour les odeurs en intérieur j'utilise le papier d'arménie avec succès lorsque mes chats ont la gentillesse de laisser des cadeaux sous mon lit durant mes vacances par exemple (genre toutes les proies qu'ils ont eu en mon absence... miam !)
c'est assez radical heureusement !
> Vous êtes tous des affreux, à vous attendre à pire. La brebis serait morte que ça aurait tout changé ?
Non, mais en ce qui me concerne à la lecture de la première ligne je m'attendais à de la maltraitance, ce que je considère effectivement comme bien pire.
Je l'ai vu venir, celle-là! Chapeau bas, Docteur! Pour ma part, je me souviens d'un petit matin brumeux, au point de l'aube, quand rien n'a de couleur, et que l'éleveur m'a lâché la brebis pour aller vomir tout son saoul... et est revenu penaud et admiratif de me voir tenir bon, moi une femme... no comment! Je note aussi pour le savon antipestilence!
On s'y croirait!! J'ai déjà donné et en tant que fille le jus qui peut remonter doucement le long du soutif ... Un truc qui marche pas mal sur les odeur c'est le rinçage à la soupline pure après un bon lavage mais il y a toujours des restes
Bon, y a pas à dire, je n'échangerais pas ma place de sage-femme avec la tienne !! même si les murs des salles de naissance sont plus souvent jaune pisseux que décorés de "motifs enfantins" et les lits rarement ronds et colorés... (j'aimerais tant que l'univers de la naissance soit tel que tu le vois !)
Fourrure :
Alors mes proches ont eu de la chance !
chapeau pour ce professionnalisme.Pour les odeurs, le bicarbonate de sodium c'est pas mal...
sinon, vous avez une prime pour les vêtements bousillés? ;)
"Monsieur Fourrure",
votre blog est génial !
Je suis "tombée" par hasard sur votre blog qui est absolument passionnant et très bien écrit.
Merci encore pour toutes ces histoires épiques, humoristiques ou émouvantes...
Tu peux certes envier les sages-femmes mais des fois ça ressemble aussi un peu à ça. :-/
Fourrure :
En fait je ne veux pas savoir.
Bonsoir,
Je suis votre blog avec beaucoup d'attention, mélangée entre une grande admiration et ... questionnements...
Je suis étudiante en 2ème année de médecine vétérinaire en Belgique, et bien que la vue du sang, des chirurgies et autopsies ne me dérange pas, ce genre de post m'inquiète... Comment faire face à quelque chose d'aussi dur? (Je crois qu'on peut parler de violence )... Comment faire face à cela? Sans doute que sur le moment, on n'y réfléchi pas trop, on pense au vivant, à sauver cette vie, oui, mais après?
Je vous admire Doc, et j'espère trouver un maitre de stage tout aussi pationnant que vous :)
Bonne continuation en tout cas, et tous nos voeux de bonheur et de magie pour cette nouvelle année de la part de pas mal d'étudiants Liegeois :)
Fourrure :
Je ne sais pas... La question ne se pose pas, je crois. Il faut le faire, c'est tout. On n'a pas vraiment le choix.
Bon, d'accord, en général, j'adore me moquer. Des gens, des choses.. En fonction de leurs avis, de leurs actes... Un cynisme de façade, qui je dois avouer se répand en gouttes façon mouillé des yeux quand je viens ici. Et c'est bien aussi.
C'est pas trop mon genre, mais ce soir, laissez que je vous embrasse sur la joue.
En commençant l'article je me disais que ça ne pouvait pas être pire que le coup du veau scié dans la vache, mais si. Beuh. Pauvre brebis, et vous avez un coeur sacrément bien accroché, j'en frémis rien que de l'évoquer.
et bien l'éleveur et la brebis ont eu de la chance de vous avoir !! moi je ne l'ai pas eu mon veto ne prend pas ce genre de chose! j'ai donc du faire comme vous :sortir un agneau pourri qui se détaché en morceaux dés que j'essayais de tirer!! au final il est sorti en trois bout et ma brebis est morte trés probablement d'une déchirure; je confirme :l'odeur est épouvantable!
Encore un article à ne pas lire quand on est enceinte! Mais je ne regrette pas, c'était passionnant, merci :-)
mince, je me pose encore et toujours la même question, toujours sans réponse : pourquoi en médecine humaine on a un staff "magique" qui nous simplifie la tâche (et les taches :-) ) et qu'en véto, vous êtes toujours seuls (avec votre doctorat dans la poche de la chemise) pour les taches ingrates, sans aucune aide ?
Surtout que financièrement, les cliniques véto ont quand même souvent le financement, faut pas pousser...
Fourrure :
Vous parlez du ménage post-mise-bas bordélique ?
A cette heure-là, j'aurais besoin de quelqu'un pour ce genre de boulot un soir sur... je sais pas, une fois par mois. Je vais pas faire poireauter (et payer !) une personne tous les soirs pour passer un coup de ménage une fois par mois... !
Et je pense que vous surestimez les capacités financières de la majorité des cabinets et cliniques vétérinaires !
Respect! L'agneau y est passé mais la brebis a survécu grâce à vous et c'est l'essentiel!
Pour déjà avoir vécu ça sur une vache (jumeau mal formé resté coinçé au fond de l'utérus ) ç'est vraiment pas une partie de plaisir (en plus le notre était tellement pourri qu'on pouvait pas tirer dessus, tout se "détachait" on a du découper... ) bref que du bonheur.
La véto remplançante avait du appeler son collègue pour donner un coup de main. le genre de chose qui n'arrive qu'une fois dans la vie d'un éleveur mais combien de fois pour un véto rural ?
Je suis médecin en rural et je n'ai ni le staff magique ni la gentille infirmière. Je serpille moi meme les vomis et les cacas des gosses, je range mon matos d'urgence seule à 20h30 et je me régale de ce moment ou le patient se tourne et dit "merci docteur". Ca m'enrobe le coeur de chamallow.
Je suis d'accord avec Gid. Hisoire impressionnante comme souvent.
Je ne sais pas si vous lisez les commentaires des vieux articles, dans le doute, j'en laisse un..
Ce récit me rappelle une longue nuit il y a des années :
Agée de 13 ou 14ans, j'étais restée dormir chez une amie, dont le père avait acheté quelques temps avant 2 jeunes chèvres naines.
Le temps passant, une des chèvres avait pris du ventre et des mamelles. Ce jour là elle a commencé le travail. Au bout de quelques temps, rien ne semblait avancer, la chèvre poussait et hurlait mais pas de chevreau en vue..
Nous avons appelé un éleveur de chèvre voisin au milieu de la nuit. En arrivant, son verdict a été simple : la chèvre naine a été saillie trop jeune par un bouc trop gros, elle est épuisée, le chevreau ne passera pas tout seul..
S'en ai suivi de longues minutes à essayer de le sortir, les pattes avant dépassant mais le reste toujours bloqué dedans.. Et pas assez de place dans le ventre de la (toute petite) chèvre pour attraper la tête.. Des main d'enfants auraient pu aider, ce fut donc mon tour de mettre "la main à la pâte".. Malgré tous nos efforts, pas moyen de tirer le chevreau, direction le véto de garde. Il n'a pas réussi non plus à le sortir, et a du ouvrir la chèvre. Le chevreau est mort au cours de la césarienne, mais la mère a survécu.
Cette nuit reste un souvenir étrange dans ma mémoire, triste mais aussi très instructif ..
Fourrure :
Mais si, je les lis.