Des gosses
mardi 30 septembre 2008, 21:29 Animalecdotes Lien permanent
Il est à peine onze heures lorsque je ressors mon bras du vagin de la vache.
"Torsion utérine, 3/4 tour, irréductible. On ouvre !"
Dans les minutes qui suivent, déboulent papys, voisins et autres curieux venus assister au grand show : la césarienne. La scène est avantageuse : lumière claire, paille fraîche, petite brise. Quelques meuglements et pépiements en guise de musique, plus le parfum des bovins mêlés à l'odeur indéfinissable de l'herbe humide qui sèche au frais soleil de septembre...
Nettoyage, désinfection, incision, je demande au papy qui vient d'arriver de m'attraper la boîte métallique contenant mes instruments de chirurgie.
"Sans mettre les doigts dedans, s'il vous plaît."
Gagné, il a mis ses gros doigts dedans, mais sans rien toucher.
Boaf.
Grand, raide, la peau cuivrée par le soleil sous sa casquette, pantalon brun et chemise d'un bleu indéfinissable, il commence à chahuter avec l'éleveur qui s'appuie contre la génisse, juste à côté de moi.
Et lorsque je me retourne... Sourire en coin, yeux plissés, le papy de 85 ans est occupé à mimer un coup de bistouri dans le ventre de l'éleveur.
Mignon...
Un bruit métallique. Je me retourne brusquement, le papy tient mon scalpel dans sa main droite, et mime encore une fois le coup de bistouri.
J'explose.
"Mais bordel, ça va pas bien non ?"
Incrédule, voix fautive : "Mais je n'allais pas le faire !"
Je n'y crois pas. Il se justifie comme un gamin. Là, je gueule franchement.
"Mais rien à foutre que vous lui ouvriez le ventre !"
Je détache bien les syllabes.
"Mais..."
Un gosse...
"Mes instruments sont stériles, et vos mains sont dégueulasses ! Ca va pas bien non ? Putaaaaaiiiin ça va dans le ventre de la vache ça !"
Et blam, il repose très vite mon scalpel dans la boîte.
Génial.
N'empêche qu'après, j'ai eu l'assistant le plus zélé de ma carrière. Il n'a plus moufté, plus rien dit, il devançait chaque fois mes gestes lorsque je me retournais pour saisir une aiguille ou un clamp.
Des gosses !
Commentaires
Mouahahaha, excellent, je vois très bien la scène.
Tu avais beau me l'avoir racontée auparavant, cette anecdote m'a bien fait rire.
Bon courage et à +
FéliX
Hahahaha! Excellent!! C'est vrai on imagine trop bien la scène!
Merci
C'est très mignon comme histoire. Et puis au moins, si jamais il y a des complications, c'est pas toi qu'on accusera de ne pas être propre...
N'empêche, j'aime bien les voir comme ça les papis... Ils ne donnent pas l'air d'être malheureux au moins. Ha la viellesse !
Le coup des pouces dans la boite, c'est systématique, même quand on a expliqué avant comment la prendre par l'extérieur, mais alors là! Farfouiller dans les instruments on me l'a encore jamais faite, celle-là!
1) c'est bien marrant d'imaginer le papy
2) je me dois de vous tagguer (ahhhh, ces chaînes à faire suivre...)
C'est vrai que finalement....
Enfin... finalement, cet ancêtre t'as servi de muse, et t'offre ainsi un billet très drôle !!!
C'est toujours mieux qu'un coup de corne...muse !
@rikko : hehe, très drôle aussi, comme ce billet. C'est marrant, je n'imaginais pas les Muses comme de vieux rigolards octogénaires et puérils ;op
*va réviser sous un angle nouveau certaines de ses lectures*
La scène est très drôle et bien racontée.
J'espère que le veau s'en est mieux sorti que le papy...
Fourrure : Le veau allait très bien !
Belle histoire, mais deux fois l'adjectif "indéfinissable" dans le même post ça sent la facilité... ou la fatigue...
Désolé, je sors...
ha ha ha j'imagine trop bien le petit vieux qui fait le malin ! Bravo
beau tableau !
Moi j'aime bien la phrase "Mais rien à foutre que vous lui ouvriez le ventre !"
hihihi