Fièvre catarrhale, c'est parti...
lundi 18 août 2008, 13:16 Vétérinaire au quotidien Lien permanent
Ca y est, elle est là. Elle ? La fièvre catarrhale ovine...
Tout le monde s'est planté : les labos, les vétos, les éleveurs, les GDS...
Nous pensions avoir le temps de la voir venir.
Il y a à peine dix jours, je disais encore à un client : "vous savez, si la maladie continue à rester dans ses foyers d'origine, on attendra sans doute la prophylaxie de cet hiver pour vacciner.
- Ah oui docteur, ça serait franchement mieux."
Ils n'y croyaient plus. Ils ne voulaient plus mettre d'anti-moustiques.
Nous restions prudents, mais détendus. On verrait bien.
Alors on vaccinait (et on vaccine toujours) les broutards pour l'exportation, en attendant les doses pour les troupeaux.
Ca n'arrive qu'aux autres, n'est-ce pas ?
Ironiquement, c'est moi qui ai eu l'honneur de voir la première, alors que je vaccinais les veaux d'un client. Pas en forme, 40,5°, des bouses un peu sèche, des raideurs, mais rien d'autre. J'ai pensé à une anaplasmose. Perdu.
Et puis je suis parti en vacances. Quand je pars en vacances, je coupe tout, je deviens injoignable. J'ai bien fait, ils m'ont envoyé un sms : "FCO, on baigne dedans, à la semaine prochaine".
Mon "anaplasmose" a été un peu mieux (merci les anti-inflammatoires) mais a continué à bricoler. Je la sentais mal, j'avais briefé mes confrères avant de partir. Penser à la revoir.
Et puis une autre à fait pareil à 8 km de là. A la troisième vache aux symptômes incompréhensibles, Olivier a bien du se rendre à l'évidence. Surtout quand il a reçu un coup de fil d'un confrère voisin : "je crois que j'ai de la FCO, toi aussi tu as des trucs bizarres ?"
Jeudi dernier, le foyer le plus proche était à plus de 200 km.
Pour l'instant, nous n'avons que des cas très très frustes.
Du coup, tous les éleveurs ovins qui ne voulaient pas vacciner parce qu'"on ne sait jamais, avec ces vaccins", veulent que nous passions chez eux. On commence à 7h demain.
Branle-le-bas de combat !
Je vous tiendrai au courant.
Commentaires
Arg! Et bien bon courage, et espérant que les cas restent sporadiques et que l'épidémie ne prenne pas des alures de flambée! Je sais que cela risque de ne pas être le cas dans les prochains jours, mais essayez de vous ménager!
A bientôt.
Et bien...des temps mouvementés à venir pour vous et les éleveurs...bonne chance et bon courage
courage!!!
oula...pas de chance...bon courage en tout cas !
Fourrure :
Pour nous, ça va encore : le plus dur sera de gérer l'angoisse des éleveurs qui voudraient vacciner, alors que nous n'aurons les doses que dans plus d'un mois. C'est surtout aux malchanceux sur lesquels ça va tomber qu'il faut souhaiter bon courage.
Je compatis, j'ai eu mes premières suspicions cliniques aujourd'hui... (avec à vrai dire peu ou pas d'autres hypothèses...)
Nous nageons en plein dedans depuis juin. Vaccinés ou pas les animaux semblent atteints pareillement. Quelques élevages résistent et n'ont pas de cas. J'en fais partie mais jusqu'à quand, mes animaux ne sont pas vaccinés et je crains pour cet automne où nous avons souvent une récrudescence de moustiques. Que conclure ? Que certains animaux sont plus résistants, que le vaccin est efficace mais a été fait trop tard pour que l'immunité se mette en place… ? Perte chez certains : plus de 10% du cheptel même vacciné.
On croise les onglons pour que cela s'arrête.
Fourrure :
Je découvre le sens de la formule crise sanitaire. C'est du délire, et pourtant ce n'est que du sérotype 1, les dégâts sont très limités pour les bovins. 12 heures de boulot intensif par jour, depuis une semaine. Et ça continue...
J'ai par contre de bons échos de la vaccination, les cas ont commencé avant elle ? L'hypothèse du "trop tard" me semble malheureusement la bonne. Ainsi que la pression d'infection si seuls les broutards sont vaccinés : si 1000 moustiques infectés piquent chaque jour un broutard dans un élevage, il finira par la faire, sa FCO. Quand tous les animaux sont vaccinés, ce cas de figure n'arrive pas : une vaccination efficace c'est une vaccination massive. Comme la désinsectisation.
Je penche aussi pour le "trop tard". Il y a beaucoup de dégat chez les ovins, les bovins vaccinés se remettant mieux sur pattes. Quant aux bovins pas vaccinés je suis une des rares refractaires, je me renseigne auprès d'un ami agriculteur bio ayant 200 mères allaitantes (un autre "fou").
Les cas ont effectivement commencés avant la vaccination et, le must, quand les ovins ont été de plus en plus atteints nos vétérinaires ont reçu l'ordre de ne plus vacciner les caprins !! Donc les chèvres laitières encore indemnes ont forcément été moins bien…
Certains véto. font des tests sur toute une exloitation pour évaluer la quantité d'animaux positifs. Résultats… tadam… 90% en moyenne d'atteints. Les exploitations qui ont les plus fort taux de positivité n'ont pas forcément le plus d'animaux malades. D'autres constantes doivent entrer en jeu (alimentation, mode de vie, désinsectisation…).
Y aura-t-il des études scientifiques avec groupes témoins faites ?
Avez-vous des cas chez des chevaux ? Cela parait invraissemblable mais il qqs chevaux morts avec des symptômes étrangement similaires (dixit véto. qui n'a pas osé faire les tests post mortem).
Pour les ruminants sauvages (chevreuils and co) les associations de chasse n'ont pas d'informations.
Fourrure :
Pour les chevaux : ne pas oublier que la FCO a des symptômes bien peu spécifiques et qu'il est facile de la confondre avec autre chose. A ma connaissance, aucun cas n'a jamais été rapporté : le virus ne touche que les ruminants.
Pour les ruminants sauvages : ils semblent se comporter comme les chèvres : peu de malades, beaucoup de porteurs.
Il est normal que les taux de positivité deviennent énormes dans une exploitation : entre celles qui ont contracté le virus cette année ou celle d'avant, logique. Il n'est pas étonnant que le nombre d'animaux réellement malades soit très variables, ceci a déjà été constaté avant : c'est comme pour la grippe (humaine), les plus faibles sont les plus malades (en moyenne). Par ailleurs, il n'est pas impossible que votre troupeau soit atteint, sans qu'il y ait de malades. Un troupeau vermifugé mais sans excès, bien nourri mais pas trop poussé, avec une génétique raisonnable (pas de champions dedans) doit pouvoir bien s'en tirer.
N'oublions pas que cette maladie n'est pas nouvelle : cela fait des décennies qu'elle se balade dans tout l'hémisphère sud ! Là-bas, avec le temps, ce n'est plus qu'un maladie parmi d'autres. Elle fait des ravages chez nous car nos animaux n'ont jamais rencontré ce virus.
Merci pour vos infos. Nous virons un peu à la psychose (grandement alimentée par les on-dit).
Nous bataillions déjà contre la piroplasmose, l'erlichiose, les entérotoxémies diverses et variées, la grippe aviaire, les petits prions et j'en passe. Une de plus, une de moins…
Est-ce choquant de préférer une sélection par la résistance et de ne pas vacciner ?
Fourrure :
Choquant ? Non, pourquoi ?
C'est un choix, il faut en assumer les conséquences. J'espère que vous n'aurez pas à le regretter !
Par contre, je ne comprends pas bien pourquoi vous ne voulez pas vacciner ? Si c'est pour sélectionner des individus résistants, vous prenez le risque d'y payer un bien lourd tribu.
Oui et non.
Si les vaccins eussent été disponible en temps et en heure (donc en fin d'hiver), je n'y aurais pas vu d'inconvient. En fait je ne comprends pas l'intêret du vaccin (dont l'efficacité et l'incidence non pas été testé) quand mes animaux sont tous (ou quasi) porteurs. J'ai fait le choix de la rusticité et mes chers et tendres (il n'y a pas de restriction financière puisque double actif) se portent aussi bien voir mieux que les voisins surtraités, survaccinés, suralimentés (de mon opinion qui n'est pas celle de leur agriculteur).
Croisons les onglons.
Une des rares vaches résistantes à la maladie du sommeil est… l'aubrac qui venant de son Cantal natal n'y a jamais été confronté.
La politique agricole actuelle m'exaspère mais c'est un autre sujet.
Fourrure : Avec des animaux séropositifs et donc naturellement immunisés, je comprends mieux ! Et, oui, dans ce cas là, la vaccination devient franchement optionnelle.
Par contre, vous êtes sévère avec les vaccins : s'ils n'ont pas été testés selon les circuits classiques, urgence oblige, ils sont quand même les héritiers de vaccins FCO développés depuis longtemps pour l'Afrique, l'Amérique du sud ou même le sud de l'Europe. Par ailleurs, j'ai plutôt de bons retours sur la vaccination dans le nord de la France (retours d'éleveurs, s'entend).
Je n'ose intervenir, pourtant...
Fourrure : Si, si, osez !
Un, parce que je ne me réjouis pas de cette "avancée" du 1! Même si il n'y a pas trop de dégâts chez les bovins( heureusement qu'il y a les blogs pour que tu me l'apprennes ), je pense à mes copains qui ont des ovins et qui paient déjà cher avec le stéréotype 8 ! Je ne change pas d'avis, une vaccination quasi nationale des 2 stéréotypes s'imposera le plus tôt possible même si on peut attendre l'hiver pour le 1 dans ma région !
Deux parce que l'on assiste impuissant à de nouvelles menaces épidémiologiques... Je m'explique, les vecteurs sont dans ce cas le vrai soucis. Or on ne sait rien d'eux ! Le brassage des populations, des marchandises est tel aujourd'hui qu'en cas d'épidémie, si il y a une incubation longue, il se crée un décalage entre le passage de la maladie et son apparition ! On a donc toujours une bataille de retard ! Or, il n'y a pas de moyens de contrôler les vecteurs potentiels... Un moustique prend la voiture, le camion, le bateau... En une nuit, il traverse la France, en 24 heures, l'Europe ! Comment le stéréotype 8 est il arrivé en Belgique ? Le plus plausible semble être le concours d'Aix la Chapelle...
Fourrure : Possible, mais pas certain du tout, les importations néerlandaises de fleurs ultre-fraîches venues d'Afrique semblent aussi de bonnes candidates. ce qui ne change pas grand chose, de toute façon.
Des chevaux pour une maladie de ruminants ?
Fourrure : Heuuu.. là je ne comprends pas.
Et alors, c'est le moustique qui compte pas le porteur !
Fourrure : Les deux sont indissociables !
En stratégie, nous avons des années de retard, trop de certitudes souvent contradictoires! Sais tu que certains profs d'écoles vétérinaires "spécialistes", suite à notre débat où je t'avais un peu heurté ( je m'excuse encore!) raconte à leurs élèves que la meilleure façon de lutter serait de désinsectiser, non pas les seuls animaux mais la totalité du pays ? Imagine un instant des avions pulvérisant, les psychoses... Et cela m'amène au :
Fourrure : Attention à ne pas sortir les éléments du contexte. J'ai entendu ce genre de choses mais à chaque fois pour souligner l'impossibilité d'une telle méthode. Enfin, j'espère que c'est le cas là aussi... Ou alors les étudiants qui colportent ça manquent un peu de recul. Ca me rappelle une anecdote :
Une stagiaire m'expliquait posément qu'une vache pouvait avoir en même temps les maladies X et Y, et que dans ce cas elle avait souvent aussi la peste et le choléra ! En fait, le prof avait dit : "bien sûr, n'excluez pas la possibilité de rencontrer les deux maladies simultanément, en diagnostiquer une n'exclue pas forcément l'autre. On peut avoir la peste et le choléra." Juste une expression, en fait.
Trois : Le syndrome de l'ESB nous tétanise et paralyse le système : Je m'explique ! En février 2007, j'ai participé à des réunions pour tenter de donner des pistes en cas d'arrivée de la FCO chez nous!( On n'y croyait pas trop car les vents dominants... Perdu ! ). Notre principal soucis était de communiquer sans affoler la population pour que la consommation de viande ne baisse pas ! Exercice quasi impossible, résultat ; cacophonie générale ! On a passé des heures à ergoter sur les périmètres administratifs et inutiles parce qu'on ne savait rien ou peu de la maladie ! C'est suite à cela que je me suis convaincu que la vaccination était la seule voie possible ! Mais la réaction des éleveurs est légitime car on ne leur dit pas grand chose ! Impossible de connaître les pourcentages de pertes, de dégâts... Ils ont perçu la maladie comme une maladie commerciale au départ ! Puis la maladie est arrivée,du coup, dès que les vaccins sont arrivés, 90 % des animaux éligibles ont été vaccinés ! Tu peux le dire à tes éleveurs ! Le gros problème vient plutôt des effets très contrastés d'un élevage à l'autre ! Un de tes collègues belges a un troupeau à lui, il n'a jamais vu d'animaux malades et a été surpris de les trouver tous positifs à la sérologie... Tandis que certains troupeaux ( rares) ici ont eu jusqu'à 30% d'avortements et de veaux morts cet hiver.. Mais ces infos circulent par "on dit" sans valeur scientifique ! Et cela nous conduit au :
Fourrure : Voilà un point essentiel, le manque de communication. J'essaie de jouer sur ce point, à ma manière...
Quatre : Toute décision dans notre pays est sujet systématiquement à discussion ! Or en la matière, il faut une discipline d'enfer pour gagner ! Et c'est cela qui me fait le plus peur. J'ai géré une crise sanitaire avec un préfet du temps où j'étais responsable professionnel ! L'efficacité n'est pas dans les manuels , elle est dans la responsabilisation de chacun ! Une mesure idiote ne sera jamais appliquée que de façon idiote et manquera son objectif ! L'information, la vraie, est donc la seconde clef pour gagner, pas la politique spectacle !
En vaccinant mes génisses , on se disait avec mon véto, que vu ce que nous avions vécu ces temps-ci, une épidémie chez les humains aurait des effets aussi catastrophiques que les grandes pestes du moyen âge... Mais sans doute sommes nous trop pessimistes !!!
Pour le moustique et le cheval, je voulais juste dire que des moustiques vecteurs pouvaient voyager sur le cheval ou dans sa litière sans que celui-ci soit malade !
Pour la démoustiquation, on est d'accord, irréalisable d'autant qu'il s'agit peut être d'insectes hibernant dans les étables ou autres fumiers donc quasi intouchables ! Mais certains spécialistes y ont pensé, pour vite reculer en imaginant les conséquences...
Pour les fleurs, je sais que c'est l'hypothèse la plus avancée mais j'ai juste une réserve de taille : Les fleurs voyagent dans des containers réfrigérés chose que les moustiques n'aiment pas du tout ! Remarque en afrique, dans les chambres climatisées, on n'a pas besoin de moustiquaire, alors dans une "boite" à moins de 5°... Mais mes compétences s'arrêtent au bon sens, ce qui les limite beaucoup ! Cela ne change pas grand chose si ce n'est que le bond afrique/pays bas s'est probablement fait par avion, ce qui démontre la vulnérabilité de nos systèmes de protection sanitaire ! C'est cela qui est vraiment nouveau. Déjà, la fièvre aphteuse en Angleterre avec peut être des restes de plateaux repas d'une compagnie aérienne.
En fait, dame nature comme bien souvent, nous ramène à un peu de modestie ! Et heureusement qu'il y a des communicants comme toi, des gens de terrain qui osent parler. Parce qu'avouons le, les informations, ce n'est pas le fort de notre administration sanitaire, peut être que dans 5 ans après de nombreuses études... J'en apprends plus en te lisant qu'en essayant de décrypter la bible nationale ! Et si je te pousse un peu dans tes retranchements c'est pour mieux étayer les arguments, pas pour porter de jugements.
Amicalement