Supprimons les jours fériés !

Non mais... C'est vrai, quoi, ras-le-bol des ponts de mai ! C'était sympa à l'école, mais depuis ces jours fériés sont devenus un redoutable cauchemar !

Vous ne me croyez pas ?

Deux hypothèses :

1) Je suis de garde/d'astreinte

Si le jour férié tombe un lundi ou un samedi, ça fait deux jours de garde d'affilée. Je commence la garde samedi soir à 19h00, je la termine mardi matin à 9h00, et en plus derrière j'enchaîne une journée de travail. Si je compte bien, ça fait 62h pendant lesquelles je vis avec mon téléphone portable sur moi dans l'attente d'un coup de fil pour une urgence. A 20h00, à minuit, à 2h00, à 11h00... Pas moyen de partir de chez moi ou de la clinique, interdiction de m'écarter de plus de 5 minutes de la voiture (donc pas de ballade dominicale, de cinéma, de restaurant...), pas question de prévoir quoi que ce soit à part attendre, attendre, attendre... et intervenir.
Vêlage, accidents, piros, les urgences se succèdent, les coups de téléphone aussi : docteur, mon chien a ceci, c'est une urgence ? Docteur, mon cheval a de la fièvre. Docteur, ya un veau au cul d'la vache, y a la tête mais pas les pattes...
Dans l'ensemble, que des vraies urgences, mais c'est usant...

Le stress est continu, car toutes ces pathologies exigent que je sois au plus vite au chevet de l'animal, à tout instant. Mon téléphone est à côté de la douche, sur ma table de nuit, dans ma poche aux WC.

De plus, je suis tout seul : pas question de me reposer sur l'un de mes confrères en cas de pathologie lourde ou de cas qu'ils ont suivi plus que moi, je dois me débrouiller avec leurs fiches et leurs ordonnances, ça a intérêt à être clair. Et je fais quoi si en plus apparemment il s'est gouré juste avant de partir en week-end ?

Et puis tout ça est payé des clopinettes, en plus. Si je suis libéral, ça ne m'apportera pas grand chose : la garde n'est pas directement rémunératrice, parce que la majoration du prix de la consultation ne compense en aucune manière la disponibilité exigée.
Je n'évoque même pas la possibilité de payer un salarié pour ça, la convention collective a tué ce recours pour la majorité des cabinets vétérinaires français.
Dans les zones assez peuplées, des réseaux de garde se mettent en place, c'est une véritable solution aux innombrables avantages. Pour les vétérinaires du moins. Mais dans une zone rurale, c'est à peu près inenvisageable si la densité de la clientèle est faible : trop de kilomètres. Et je fais quoi s'il y a un vêlage à 50 bornes de l'endroit où je suis déjà en train d'intervenir ?

Évidemment, vous me direz que tous ces inconvénients sont compensés par les jours fériés dont je profite quand mon confrère est de garde.

Des clous

2) Je ne suis pas de garde/d'astreinte

Et ben c'est pas mieux !

Avant de partir en week-end, je m'assure que tous mes dossiers sont bien remplis, que mon confrère de garde est au courant de tous les cas complexes que j'ai pris en charge ces derniers jours, que mes clients ont bien compris que ce ne serait pas moi qui répondrait au téléphone pendant plusieurs jours mais que le vétérinaire de garde serait au courant, etc.

Pendant tout le week-end en question, si je n'ai pas trouvé un moyen de m'occuper l'esprit à plein temps, je vais passer mon temps à me demander si j'ai bien pensé à parler à Olivier du york de madame Branchu, et si elle a bien compris mes recommandations au sujet de son cœur. Le matin, pas moyen de faire une grasse mat' : je suis épuisé, mais deux jours ne suffisent pas à couper le cordon, les angoisses de ces derniers jours de travail me tournent dans la tête.

Et le pire, c'est le retour au boulot au sortir du week-end. Je sais que mon confrère aura hospitalisé des cas nécessitant une chirurgie, que les clients vont se précipiter pour tous ces soins pas urgents qui, au lieu d'être étalés sur une semaine normale, s'accumulent sur quelques jours. En plus, certains d'entre eux auront laissé traîner des maladies qui n'auraient pas du attendre, ou auront empiré les choses avec une pincée d'automédication mal choisie...
Accessoirement, les stocks de médicaments ne ressemblent à rien, les jours de livraison et de commande étant décalés. Comme d'habitude, nous nous sommes emmêlés les pinceaux, et certains produits commencent à manquer.

Le rapport de la commission Fourruri préconise donc :

La suppression pure et simple des jours fériés à l'exception de Noël, parce qu'avec les enfants, c'est quand même plus sympa, et du jour de l'an, parce que c'est une vraie occasion de se réunir avec des amis.
Tous les autres ne servent de toute façon pas vraiment à retrouver des gens que l'on apprécie grâce à un jour de repos en commun, donc, peu importe, un dimanche le fera aussi bien, non ?

Ou alors on met les jours fériés le dimanche.

Je plaisante ?

Pas vraiment...

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