Jour huit. Motif : plaie

Jour huit

Motif : Plaie

J'allais partir en visite, juste avant l'ouverture de la clinique, quand j'ai vu cette dame à l'air désemparé sur le parking. Il n'y a aucun rendez-vous à 9h00, je viens justement de vérifier. Je baisse la vitre et la salue. Elle vient pour un chaton. Non, elle n' a pas pris rendez-vous. Elle ne savait pas. Je lui explique qu'il faut appeler, toujours, même pour une urgence. Là, il n'y aurait pas eu de vétérinaire sur place avant une bonne heure, nous étions tous en visite.

Je la rassure, coupe le contact et ouvre la porte latérale de la clinique. Les ASV ne sont pas encore là, je ne veux pas que d'autre personne entre.

C'est une vilaine plaie à la queue, que le chaton ne me laisse pas examiner. Je subodore qu'elle s'enfonce bien plus profondément que le premier coup d’œil ne le laisse supposer. Elle ne sait pas comment le chaton s'est fait mal, mais la blessure date de hier soir. Elle l'a désinfectée.

Vu le très faible niveau de coopération de la bête, de toute façon, je n'ai pas 36 alternatives : je vais devoir l'anesthésier, et me préparer à toutes les possibilités. J'évoque donc avec Mme Maudan les différentes possibilités, du simple parage avec pansement jusqu'à l'amputation.

Anti-inflammatoires, antibiotiques. Et je file en visite, on verra ça tout à l'heure, il n'y a pas urgence.

Il me faut environ une heure pour faire le tour de trois exploitations proches – vaccination FCO, encore.

Lorsque je reviens, la clinique est très calme. Je devrais avoir le temps d'opérer le chaton avant que le prochain rendez-vous n'arrive. Un contrôle dermato, puis un contrôle ophtalmo. Ils pourront éventuellement attendre un peu.

Deux injections, j'esquive les morsures. Je repose le chaton dans sa cage, il lui faudra quelques minutes pour s'endormir vraiment. Dès qu'il dort, Perrine, l'ASV qui est sur le pont ce matin, prend la tondeuse et nettoie. J'en profite pour aller faire quelques factures.

Lorsque je reviens dans la salle de préparation, la queue est tondue, lavée, désinfectée.

- Vous amputez ?

Honnêtement, je n'en sais rien, je n'ai pas encore regardé. Je tourne et retourne la plaie. 4 cm de coupure cutanée, plus ou moins dans le sens de la longueur, des muscles releveurs de la queue sectionnés, mais pas complètement. Les ligaments des vertèbres caudales sont intacts. La vascularisation n'est pas atteinte.

- On tente de garder.

Perrine sort une petite boite de chirurgie, redésinfecte la plaie tandis que je me lave les mains. Une paire de gants, un fil non résorbable, un gros tas de compresses. Je commence par enlever les poils collés dans les recoins de la blessure. Puis je gratte dans les cul-de-sac et commencer à raviver la plaie en frottant à la compresse. Je désinfecte, encore et encore. Puis je décide de poser trois points en X sur la partie supérieure de la blessure tout en laissant la partie inférieure, la plus étroite, ouverte : la plaie est en phase de détersion, elle va suinter. Si j'enferme tout ça, je n'aurais que des complications. Comme d'habitude, je cherche le meilleure compromis entre « théorie médicale », faisabilité et acceptabilité par l'animal. Si le patient détruit méthodiquement ce que je fais quelques minutes après le réveil, ça ne sert à rien de faire la plus « belle » suture du mois.

J'enrobe le tout dans un pansement collé sur la partie supérieure de la queue mais ouvert sur la partie inférieure de la plaie. Il fera une « casquette » protégeant la blessure, tout en laissant les écoulement sortir librement. Ce chaton ne laissera personne lui refaire un pansement…

J'enlève mes gants, et remets le chaton dans sa cage, avec une bouillotte. Il fait très chaud aujourd'hui, mais s'il met plus de temps à se réveiller que ce que j'estime, on risque l'hypothermie.

Il ne me reste plus qu'à préparer l'ordonnance et à téléphoner à Mme Maudan pour lui faire le compte-rendu.

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